• Bonjour ensoleillé à mon lectorat. Il a plu toute la semaine sur les Vosges, j'apprécie d'autant plus ce soleil radieux qui a commencé par enflammer la Forêt Noire puis a continué son chemin pour faire fondre le givre de cette nuit...

    Que se passe-t-il? Très peu de lecteurs pour la diffusion de la semaine dernière, un coup de mou? D'autres occupations? Ou alors vous n'aimeriez pas mon texte? Vite, rassurez-moi! Bon dimanche...

     

     

     

     

     

     

    La Saga de Luc

    disponible aux Editions les 3 Colonnes 

     

     

     

    La fête du Sablon - Les cousines - La quête

    L’espérance et le Philharmonique - La lessiveuse

     

    - Dis donc Luc, ça t’intéresse ce que je  dis?

    - Mais si monsieur, ça m’intéresse beaucoup, mentit Luc, pris de court.

    - Bien, alors explique à tes petits camarades ce qu’est un pharisien, tu vois, nous t’écoutons, nous sommes tous avides de savoir...

    Luc fixa les peintures représentant les Saints, Luc, Marc, Jean, et Matthieu, il leur adressa une brève prière, je vous en prie très chers saints, ne me laissez pas tomber...

    - Alors? Nous sommes suspendus à tes lèvres.

    - Ce sont les habitants de la Pharisie...

    Le sourire plein de bonté de monsieur Zacary plus quelques rires étouffés accentuèrent sa rougeur, et comme de bien entendu, ses oreilles virèrent au cramoisi. Du coin de la bouche, André lui souffla,

    - Allons, secoue-toi mon garçon, secoue-toi...

    - Bien, je vais reprendre pour votre camarade qui me semble un peu dans la lune.

    Par bonheur, Marthe et Suzanne n’avaient pu entendre. Vint le sermon.

    Absorbé dans la contemplation de Saint Luc, avec lequel il se demandait s’il aurait pu avoir un éventuel lien de parenté, Luc anticipait, établissait de savants calculs sur la façon de dépenser le plus judicieusement son maigre budget, quand la voix du pasteur tonna.

    - Oui, je vous le dis, certains doutent de la présence de Dieu! Et pour quelle raison? Parce qu’ils prétendent ne pas le voir!

    Il semblait vraiment en colère, tous les bustes et les têtes raides convergeaient vers la chaire. Il inspira, gonfla ses joues et souffla de toutes ses forces. La fine poussière en suspension dans l’air, dorée par la luminosité des vitraux, ondula et reflua jusqu’à la zone d’ombre, vers le portail de l’entrée. Il regarda tous les visages silencieux et figés comme s’il avait éprouvé un immense chagrin. Il attendit un instant, le temps que les esprits s’imbibent de sa parole, puis il sourit,  sa voix tonna à nouveau.

     

    - Oui! Vous avez tous vu, vous m’avez vu souffler! Mon souffle a porté jusqu’à l’entrée, mai                      vous n’avez pas vu mon souffle! Vous n’avez vu que ses effets! Et pourtant, Il existe! Oui Il existe!    Dieu existe!   

    Sa démonstration faite,le pasteur se radoucit et ajouta de sa belle voix grave destinée à faire fondre le pire des garnements.

    - Oui mes chers enfants, Dieu est ici, avec nous, autour de nous. Dieu est partout, avec chacun de nous, dans la joie comme dans la peine... Nous allons dire maintenant le Notre Père.

    Luc fut tellement marqué qu’il sortit du temple mal à l’aise. Marion qui sautillait et chantonnait ne cacha pas son étonnement en entendant le ton sérieux de son frère.

    - C’est fini, on n’achète plus de caramels avec l’argent de la quête. IL le sait, IL nous voit.

    Il s’arrêta pour uriner, à l’abri d’un porche. Il sursauta au son d’une voix rauque.

    - Fais gaffe duchnoc, IL te voit, et n’oublie pas de secouer!

    - Va donc, espèce de rigolo!

     

    Les façades se renvoyèrent à l’heure de l’apéritif les roulements de tambour et les sonneries de clairon des deux formations ennemies du quartier. Les accents vengeurs de “ Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine “ tentaient de couvrir les notes impétueuses de la marche de la 2ème DB. En théorie, un minutage sur un parcours immuable devait éviter toute concurrence. Le Philharmonique partait de la Place de l’Eglise, l’Espérance du Café de l’Espérance, leur quartier général. Après une sérieuse mise en forme à l’aide de flots de bière, les deux formations attaquaient les rues lorsque le soleil était déjà haut. Certes, les tambour-majors avaient juré qu’ils marcheraient l’oeil rivé sur leur montre et que l’ordre régnerait. Est-ce que la brasserie Amos aurait livré pour ce jour exceptionnel une bière plus musclée? Toujours est-il que les musiciens de l’Espérance décidèrent de prendre la rue Saint Livier d’assaut avant le Philharmonique. Les tambours se firent plus pressants, les clairons plus belliqueux. Gagné par le rythme, le tambour-major allongea le pas, puis tenta de se ressaisir. Il voulut se retourner, marcher à reculons, les bras levés au ciel pour calmer sa troupe.

    - Allons mes petits, du calme, on ne monte pas à l’assaut!

    Le regard féroce des tambours en première ligne, qui frappaient comme des dingues le dissuada d’insister, persuadé que s’il essayait, toute la troupe lui passerait sur le corps. Les applaudissements enthousiastes qui pleuvaient des balcons excitèrent encore plus les musiciens.

    - Bravo les gars! Ça c’est envoyé!

    - Ils ont dû bouffer de la vache enragée, quel allant!

    Un vieux monsieur,le béret couché sur l’oreille, salua militairement. Les yeux embués, il cria,

    - Qu’ils y reviennent les boches, ils verront ce qu’ils verront!

    Un autre qui avait entendu, persifla,

    - En tout cas, ils ne se sont pas gênés les boches pour nous rendre visite trois fois, et sans être invités en plus!

    Alerté par le niveau anormalement élevé des échos, le tambour-major du Philharmonique flaira le danger, l’adversaire voulait annexer “sa” rue! Son visage d’ordinaire rougeaud vira au violet. Il accéléra la cadence. Ses musiciens ébahis devinèrent vite le drame qui se nouait en voyant leur chef cavaler à une bonne vingtaine de mètres. Les tambours en colère prirent le mors aux dents, les clairons vidèrent leurs tripes et leurs poumons dans les embouts. Le gros Léon aurait réduit un bœuf en purée entre ses cymbales. La marche de la 2ème DB se mua en charge des lanciers, Leclerc en aurait certainement pleuré de joie. Prévenu, le commissaire de police évita le pire de justesse. Il donna l’ordre impératif de bloquer le carrefour stratégique de la rue Saint-Bernard et de la rue Saint-Livier. Des policiers à casquettes plates se plantèrent courageusement en travers de la chaussée, réfugiés derrière leurs bicyclettes tendues à bout de bras. Le miracle de l’autorité opéra. Les deux formations marquèrent le pas. Les musiciens se foudroyaient du regard, soufflaient et battaient à la limite de leurs forces. Ils s’arrêtèrent brusquement. Un ordre venait de claquer. Donné par qui? A un signal, les deux formations attaquèrent la Marseillaise. Dès les premières notes, la foule sur les trottoirs, les familles sur les balcons hurlèrent de plaisir. Les deux tambour-major se rejoignirent au milieu du carrefour, se serrèrent la main, même si les sourires de pure convenance ne trompèrent personne. Ils inclinèrent le torse et se saluèrent.

    - Salaud...

    - Fumier...

    Les musiciens repartirent en ordre dispersé, évitant soigneusement de se croiser, pour aller étancher une soif que la Moselle et la Seille réunies n’auraient su éteindre. Ensuite, selon la tradition, ils iraient faire du porte à porte, vendraient des rubans que les enfants épingleraient avec fierté sur leur chemise.

    Quelle journée magnifique! La nappe et la vaisselle des grands jours s’étalaient sur la table équipée de ses rallonges. Luc riait, s’amusait, se remplissait l’estomac. Il suffisait de demander et il recevait, il redemandait et recevait à nouveau, avec en prime le sourire ému de sa mère.

    - Mais oui mon petit Luc, tiens, prends encore, tu fais honneur à ma cuisine...

    Puis, s’adressant à Paul, le nouveau Jules de la tante, sur l’air du pélican qui offre ses entrailles,

     

    - Si vous saviez ce qu’il dévore! Maigre comme un clou, mais il mange comme quatre ce petit, il nous ruinera ( à suivre )

     

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