• Il ne m'a pas été interdit d'en parler, il s'agit pourtant d'une grande nouvelle, en effet, imaginez-vous que John Le Rectangle m'a fait une confidence qui vaut son pesant d'or!

    Il m'a glissé à l'oreille sur un ton mystérieux qu'il attaquait les derniers chapitres de son nouveau roman.  Non, Mao n'est pas mort...

    Quant à la trame de son nouveau bébé...

    En attendant, régalez-vous avec le roman ci-dessous, disponible aux Editions.      Les 3  Colonnes 

     

     

     

    et IL ressuscita Madonna

     

     

     

    ... et IL ressuscita Madonna

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  • Bonjour ensoleillé à mon lectorat. Il a plu toute la semaine sur les Vosges, j'apprécie d'autant plus ce soleil radieux qui a commencé par enflammer la Forêt Noire puis a continué son chemin pour faire fondre le givre de cette nuit...

    Que se passe-t-il? Très peu de lecteurs pour la diffusion de la semaine dernière, un coup de mou? D'autres occupations? Ou alors vous n'aimeriez pas mon texte? Vite, rassurez-moi! Bon dimanche...

     

     

     

     

     

     

    La Saga de Luc

    disponible aux Editions les 3 Colonnes 

     

     

     

    La fête du Sablon - Les cousines - La quête

    L’espérance et le Philharmonique - La lessiveuse

     

    - Dis donc Luc, ça t’intéresse ce que je  dis?

    - Mais si monsieur, ça m’intéresse beaucoup, mentit Luc, pris de court.

    - Bien, alors explique à tes petits camarades ce qu’est un pharisien, tu vois, nous t’écoutons, nous sommes tous avides de savoir...

    Luc fixa les peintures représentant les Saints, Luc, Marc, Jean, et Matthieu, il leur adressa une brève prière, je vous en prie très chers saints, ne me laissez pas tomber...

    - Alors? Nous sommes suspendus à tes lèvres.

    - Ce sont les habitants de la Pharisie...

    Le sourire plein de bonté de monsieur Zacary plus quelques rires étouffés accentuèrent sa rougeur, et comme de bien entendu, ses oreilles virèrent au cramoisi. Du coin de la bouche, André lui souffla,

    - Allons, secoue-toi mon garçon, secoue-toi...

    - Bien, je vais reprendre pour votre camarade qui me semble un peu dans la lune.

    Par bonheur, Marthe et Suzanne n’avaient pu entendre. Vint le sermon.

    Absorbé dans la contemplation de Saint Luc, avec lequel il se demandait s’il aurait pu avoir un éventuel lien de parenté, Luc anticipait, établissait de savants calculs sur la façon de dépenser le plus judicieusement son maigre budget, quand la voix du pasteur tonna.

    - Oui, je vous le dis, certains doutent de la présence de Dieu! Et pour quelle raison? Parce qu’ils prétendent ne pas le voir!

    Il semblait vraiment en colère, tous les bustes et les têtes raides convergeaient vers la chaire. Il inspira, gonfla ses joues et souffla de toutes ses forces. La fine poussière en suspension dans l’air, dorée par la luminosité des vitraux, ondula et reflua jusqu’à la zone d’ombre, vers le portail de l’entrée. Il regarda tous les visages silencieux et figés comme s’il avait éprouvé un immense chagrin. Il attendit un instant, le temps que les esprits s’imbibent de sa parole, puis il sourit,  sa voix tonna à nouveau.

     

    - Oui! Vous avez tous vu, vous m’avez vu souffler! Mon souffle a porté jusqu’à l’entrée, mai                      vous n’avez pas vu mon souffle! Vous n’avez vu que ses effets! Et pourtant, Il existe! Oui Il existe!    Dieu existe!   

    Sa démonstration faite,le pasteur se radoucit et ajouta de sa belle voix grave destinée à faire fondre le pire des garnements.

    - Oui mes chers enfants, Dieu est ici, avec nous, autour de nous. Dieu est partout, avec chacun de nous, dans la joie comme dans la peine... Nous allons dire maintenant le Notre Père.

    Luc fut tellement marqué qu’il sortit du temple mal à l’aise. Marion qui sautillait et chantonnait ne cacha pas son étonnement en entendant le ton sérieux de son frère.

    - C’est fini, on n’achète plus de caramels avec l’argent de la quête. IL le sait, IL nous voit.

    Il s’arrêta pour uriner, à l’abri d’un porche. Il sursauta au son d’une voix rauque.

    - Fais gaffe duchnoc, IL te voit, et n’oublie pas de secouer!

    - Va donc, espèce de rigolo!

     

    Les façades se renvoyèrent à l’heure de l’apéritif les roulements de tambour et les sonneries de clairon des deux formations ennemies du quartier. Les accents vengeurs de “ Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine “ tentaient de couvrir les notes impétueuses de la marche de la 2ème DB. En théorie, un minutage sur un parcours immuable devait éviter toute concurrence. Le Philharmonique partait de la Place de l’Eglise, l’Espérance du Café de l’Espérance, leur quartier général. Après une sérieuse mise en forme à l’aide de flots de bière, les deux formations attaquaient les rues lorsque le soleil était déjà haut. Certes, les tambour-majors avaient juré qu’ils marcheraient l’oeil rivé sur leur montre et que l’ordre régnerait. Est-ce que la brasserie Amos aurait livré pour ce jour exceptionnel une bière plus musclée? Toujours est-il que les musiciens de l’Espérance décidèrent de prendre la rue Saint Livier d’assaut avant le Philharmonique. Les tambours se firent plus pressants, les clairons plus belliqueux. Gagné par le rythme, le tambour-major allongea le pas, puis tenta de se ressaisir. Il voulut se retourner, marcher à reculons, les bras levés au ciel pour calmer sa troupe.

    - Allons mes petits, du calme, on ne monte pas à l’assaut!

    Le regard féroce des tambours en première ligne, qui frappaient comme des dingues le dissuada d’insister, persuadé que s’il essayait, toute la troupe lui passerait sur le corps. Les applaudissements enthousiastes qui pleuvaient des balcons excitèrent encore plus les musiciens.

    - Bravo les gars! Ça c’est envoyé!

    - Ils ont dû bouffer de la vache enragée, quel allant!

    Un vieux monsieur,le béret couché sur l’oreille, salua militairement. Les yeux embués, il cria,

    - Qu’ils y reviennent les boches, ils verront ce qu’ils verront!

    Un autre qui avait entendu, persifla,

    - En tout cas, ils ne se sont pas gênés les boches pour nous rendre visite trois fois, et sans être invités en plus!

    Alerté par le niveau anormalement élevé des échos, le tambour-major du Philharmonique flaira le danger, l’adversaire voulait annexer “sa” rue! Son visage d’ordinaire rougeaud vira au violet. Il accéléra la cadence. Ses musiciens ébahis devinèrent vite le drame qui se nouait en voyant leur chef cavaler à une bonne vingtaine de mètres. Les tambours en colère prirent le mors aux dents, les clairons vidèrent leurs tripes et leurs poumons dans les embouts. Le gros Léon aurait réduit un bœuf en purée entre ses cymbales. La marche de la 2ème DB se mua en charge des lanciers, Leclerc en aurait certainement pleuré de joie. Prévenu, le commissaire de police évita le pire de justesse. Il donna l’ordre impératif de bloquer le carrefour stratégique de la rue Saint-Bernard et de la rue Saint-Livier. Des policiers à casquettes plates se plantèrent courageusement en travers de la chaussée, réfugiés derrière leurs bicyclettes tendues à bout de bras. Le miracle de l’autorité opéra. Les deux formations marquèrent le pas. Les musiciens se foudroyaient du regard, soufflaient et battaient à la limite de leurs forces. Ils s’arrêtèrent brusquement. Un ordre venait de claquer. Donné par qui? A un signal, les deux formations attaquèrent la Marseillaise. Dès les premières notes, la foule sur les trottoirs, les familles sur les balcons hurlèrent de plaisir. Les deux tambour-major se rejoignirent au milieu du carrefour, se serrèrent la main, même si les sourires de pure convenance ne trompèrent personne. Ils inclinèrent le torse et se saluèrent.

    - Salaud...

    - Fumier...

    Les musiciens repartirent en ordre dispersé, évitant soigneusement de se croiser, pour aller étancher une soif que la Moselle et la Seille réunies n’auraient su éteindre. Ensuite, selon la tradition, ils iraient faire du porte à porte, vendraient des rubans que les enfants épingleraient avec fierté sur leur chemise.

    Quelle journée magnifique! La nappe et la vaisselle des grands jours s’étalaient sur la table équipée de ses rallonges. Luc riait, s’amusait, se remplissait l’estomac. Il suffisait de demander et il recevait, il redemandait et recevait à nouveau, avec en prime le sourire ému de sa mère.

    - Mais oui mon petit Luc, tiens, prends encore, tu fais honneur à ma cuisine...

    Puis, s’adressant à Paul, le nouveau Jules de la tante, sur l’air du pélican qui offre ses entrailles,

     

    - Si vous saviez ce qu’il dévore! Maigre comme un clou, mais il mange comme quatre ce petit, il nous ruinera ( à suivre )

     

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  • Quel beau samedi ensoleillé! Je ne vois plus la Forêt Noire tant je suis ébloui par ce feu hivernal... Curieusement, mes transferts de textes et de photo se sont très bien passés... Deviendrais-je moins nul? Bonne lecture...

     

     

     

     

    La Saga de Luc

    disponible aux Editions les 3 Colonnes 

     

     

    La fête du Sablon - Les cousines - La quête

    L’espérance et le Philharmonique - La lessiveuse

      

     

     

    - C’est ta sœur Nounou, tu ne dois pas la juger, c’est sa vie, et si elle se fait bienLa Saga de Luc ( suite ) payer, que ça lui rapporte...

    - Tu parles! Un polichinelle dans le tiroir, ça oui, sur les quatre filles, pas une qui se ressemble!

    Luc connaissait bien les intonations de sa mère, et la jalousie maladive qui transparaissait dans ses propos outranciers, dans le fond, cela ne lui déplaisait pas de la voir se consumer d’envie.

    Cette nuit là, le garçon resta éveillé tard, le sommeil le fuyait. Loin de sa chambre, très loin, au bord de la mer bleue, deux autres garçons, ses frères, vivaient avec un homme et un grand chien noir. Ses frères et son père. Pourquoi celui-ci ne m’a pas parlé, se répéta Luc pour la millième fois, pourquoi ne m’a-t-il pas gardé, comme il a gardé Marc? C’est lui mon vrai père, maintenant je sais. Il me trouvait trop petit, trop moche?Il ne voulait pas d’un enfant maigre aux joues creuses? Je ne l’intéressais pas, je l’ai bien vu, il ne m’a pas parlé. Pourquoi ne m’aime-t-il pas? Qu’est-ce que j’ai fait?

    Il pleura en silence et s’endormit sur l’image d’une plage où il marchait, la main serrée dans celle d’un grand monsieur.

     

    - Debout! Vous allez être en retard!

    Dimanche! La fête allait réellement commencer! Le soleil entrait profondément dans la chambre par la fenêtre grande ouverte, les martinets commençaient leurs slaloms.

    Les deux enfants se préparèrent sans se faire prier. Oui, une vraie fête, avec de la brioche aux raisins pour le petit déjeuner.

    - Dépêchez-vous, vous allez être en retard! Et fais bien attention à ta sœur, et ne traînez pas en route!

    Elle tendit à chacun une pièce de cinq francs pour la quête, peut-être aussi pour se faire pardonner de ne jamais mettre les pieds au temple. 

    Ils passèrent devant la place de l’école, tout était silencieux, figé. Mais à midi les manèges tourneraient, l’odeur de la poudre des stands de tir se mélangerait à celle des amandes grillées, des pommes d’amour et des nougats. En attendant, l’école du dimanche leur tendait les bras... Ils marquèrent un arrêt devant la vitrine de la boulangerie en haut de la rue, les confiseries y étaient si bien présentées...

    - Dis Marion, si tu achetais cinq caramels avec tes sous, deux pour moi et trois pour toi, tu vois, je suis gentil.

    - Tous les dimanches c’est la même histoire, c’est moi qui dois dépenser mes sous de la quête, c’est ton tour pour changer!

    - Ce que tu peux être bête, c’est kif-kif!

    - Non, après, moi je n’ai plus rien à donner à la quête.

    - Ce n’est pas grave, je dirai que je donne pour toi, sois pas stupide, personne ne le saura.

    - Si c’est pareil, pourquoi je dirais pas que je donne pour toi?

    - Tu le fais exprès ou quoi? C’est pareil et c’est pas pareil en même temps. Moi je suis plus grand, alors c’est normal, d’accord?

    - C’est pareil et c’est pas pareil... C’est pas parce que je suis une fille que je suis une idiote, il ne faut pas croire.

    - Bon, tu fais quoi?

    La pièce de cinq francs brûlait les doigts de Marion, ses yeux louchaient vers les bocaux de caramels, la tentation trop forte se lisait sur son visage.

    - C’est sûr que tu diras que tu donnes pour moi?

    - Promis, juré, vas-y.

    Elle n’attendait que ça pour se ruer dans le magasin. La longue trotte jusqu’au temple devenait une agréable promenade avec ce beau soleil, ils paradaient dans leurs habits du dimanche et suçaient leurs caramels de façon à les faire durer le plus longtemps possible. Leur arrivée coïncida avec la sortie de l’office pour les adultes. Le pasteur serrait les mains, distribuait sourires et mots gentils pour chacun. Des groupes d’enfants galopaient autour du temple en faisant voler les graviers. Luc héla André adossé à la grille.

    - Salut, ça va?

    - Ouais, vivement que ça se passe, j’ai plein de fric pour cet aprèm, qu’est que je vais me mettre! Et toi, tes vieux t’ont filé combien?

    - T’en fais pas pour moi, j’ai ce qu’il faut mentit Luc, jaloux de constater qu’André portait un pantalon, alors que lui devait se contenter de culottes courtes, été comme hiver. C’est pour t’endurcir lui disait sa mère.

    André lui posa la main sur l’épaule.

    - Tiens, regarde, il va secouer...

    Luc se tourna dans la direction que lui indiquait son copain. Il vit un homme de dos, de l’autre coté de la rue, dans un renfoncement entre deux façades.

    - Ben quoi, il pisse, et alors?

    - Attends, tu vas voir, il va secouer et donner un coup de cul en arrière.

    - Il va secouer quoi?

    - Qu’est-ce que tu es cloche, tiens, tu vois?

    En effet, même de dos, on voyait bien le mouvement du bras et des fesses. L’homme se retourna et se dirigea vers le café en se reboutonnant.

    - Alors, t’as vu?

    - Oui j’ai vu, il secoue quoi de particulier?

    - Son zob, enflure! Tu ne savais pas ça? C’est pour faire tomber les dernières gouttes, jobard, et plus tu es vieux, plus il faut que tu secoues!

    Les cloches qui invitaient les enfants à entrer dans le temple le dispensèrent de  justifier son ignorance sur un sujet si délicat. Les filles prirent place à gauche, les garçons à droite, en groupes distincts, les débutants comme Luc, et les autres, et les candidats à la Confirmation. Toujours souriant, le pasteur prononça quelques mots de bienvenue. Les adultes bénévoles se levèrent, la bible ouverte pour commenter le texte du jour. La vigilance s’imposait, ne pas se laisser surprendre et répondre sans hésitation aux questions se rapportant à la lecture du jour. Luc le savait, ce qui ne l’empêcha pas de s’évader en pensée du coté des filles. Son regard croisa celui de Suzanne et de Marthe. Ce qu’elles étaient jolies dans leur robe du dimanche, et leur coiffure donc, rehaussée de rubans de couleur! Malheureusement, Anita et Gabrielle ne fréquentaient pas ce temple trop éloigné de leurs domiciles.

    - Dis donc Luc, ça t’intéresse ce que je  dis? ( à suivre )

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  • Je m'aperçois que de nombreux textes sont répétés, je ne comprends pas, j'ai envie de jeter mon ordi par la fenêtre... Comment faire de l'ordre dans toutes ces manipulations?

    Pour celles et ceux qui voudraient s'éviter de comprendre ces mauvaises manipulations, il reste le texte en entier;

    La Saga de Luc

    disponible aux Editions les 3 Colonnes

     

     

     

    La fête du Sablon - Les cousines - La quête

    L’espérance et le Philharmonique - La lessiveuse

     

     

     

     

     

    Une effervescence, une fébrilité inhabituelle agitait le monde des enfants : les premières voitures des forains arrivaient pour la fête du quartier. Pendant une longue semaine, avec deux dimanches, les lumières les bruits, les cris et les odeurs allaient révolutionner le quartier en irradiant les rues depuis la place de l’école. Des camions aux museaux raplatis manoeuvraient dans des grondements de moteurs pour placer des remorques et des roulottes chaussées de bandages pleins. Ce veinard de Jeanjean proposa juste à temps ses services. Sa participation au déchargement et à la mise en place des cales en bois destinées à stabiliser la structure de la chenille, allait lui rapporter cinq à dix tours gratuits. Quand Luc réussit enfin à vaincre sa timidité, toutes les places étaient pourvues. - Désolé mon petit gars, il n’y a plus rien pour toi, fallait venir plus tôt. Il s’éloigna, dépité, prit le ciel à témoin, oui rumina-t-il, je ne pouvais pas venir plus tôt, Jeanjean, lui, n’a pas besoin de faire la vaisselle, ses deux grandes sœurs s’occupaient de tout, alors... Il alla rôder autour de la grande roulotte de la confiserie, encore ému par le sourire échangé l’année passée avec la fille des patrons. Elle ne pouvait pas ne pas le reconnaître. Deux hommes, torse nus, sortaient du matériel d’une remorque. Il s’en approcha craintivement quand il remarqua la fille assise en haut des marches de la belle roulotte. Elle croquait une pomme, le vit et lui lança un grand sourire ce qui eut pour effet de le faire rougir. Il se traita d’andouille, s’en voulut de ne pas savoir contrôler ses émotions. Il aurait dû rester, faire le brave, proposer ses services. Non seulement il aurait eu l’occasion en or de parler à la fille devenue rudement mignonne, mais en plus, le moment venu, elle lui aurait peut-être servi des parts généreuses de nougat râpé, son régal. Il croisa Pinpin. - T’as vu Luc, des autos tamponneuses cette année, c’est vachement bat! Le montage commençait en effet à l’autre bout de la place, juste à coté du stand de tir. La vache, oui, ça allait être sensass. De plus, il y aurait un grand repas ce dimanche, avec des invités, et pour que ce soit vraiment la fête, sa mère achèterait un poulet, ferait des tartes et des brioches. Les écoles participaient aussi à la fête du quartier, pas classe le lundi! La bonne humeur ainsi qu’une certaine forme d’excitation faisaient vibrer toute la rue Saint Livier, un peu comme avant Noël, le soleil et la chaleur en plus. Le clocher indiqua seulement quatre heures mais Luc décida de rentrer et de montrer le maximum d’empressement, d’une part dans l’espérance d’arracher à sa mère l’autorisation de rester dehors le soir, jusqu’à neuf heures, et pourquoi pas, arracher quelques pièces pour des tours de manège. - Ah te voilà, tu arrives bien, j’ai justement de l’eau chaude, je vais te laver. Tu es crasseux comme un peigne, à me faire honte dans le quartier, allez, déshabille-toi! Quelle horreur! Le samedi et sa séance obligatoire de lavage! Il avait bien tenté de se rebeller, de faire valoir ses dix ans, sans obtenir plus de résultat qu’une gifle. Il se dévêtit dans le coin sombre de la cuisine, le dos tourné, il s’avança ensuite vers la cuisine, les deux mains croisées sur son sexe. Hélas, il fallait bien monter sur l’évier, et pour se faire, les deux mains s’avéraient indispensables. Comme à chaque fois, il se cogna la tête dans le placard en se redressant, serra les dents et présenta son dos. Sa mère maniait le gant de toilette avec autant de force qu’un palefrenier qui étrillerait son cheval. Le garçon attendait et redoutait l’instant décisif, celui où il devait ravaler sa révolte. - Allez, tourne-toi maintenant, je n’ai pas que ça à faire! Il se retourna, les mains plaquées sur l’endroit névralgique. - Enlève tes mains, enlève-les que je te dis! Il l’aurait fusillée. Un claque, une mauvaise, une qui fait le bruit sec d’un pistolet à amorces le força à obtempérer, lui le seigneur des mers et des océans! - Tu en fais bien des manières pour ton misérable asticot, lève les mains plus haut ou tu en prends une deuxième. Comme les fois précédentes, Luc adopta l’attitude qui lui semblait la plus digne, il croisa les bras et regarda par la fenêtre ouverte, il attendit que ça se passe. - C’est terminé, regarde un peu la crasse dans la bassine! Quel plaisir après ce désagrément d’enfiler des vêtements propres, de se sentir tout neuf! - Marion, c’est ton tour! La petite fille avait largement anticipé et gambadait dans la cuisine, nue, une poupée serrée dans les bras. - Tu n’es qu’une pisseuse qui se promène cul nu énonça son frère, sans attendre de réponse. Il s’approcha de la cuisinière, résista cependant à la tentation d’ouvrir la porte du four d’où sortaient des odeurs vanillées. Il sonda le plafond, inspira à petits coups. Streusel ou tarte au sucre? Qu’importe, les deux étaient vachement bons. Des explosions montaient de la rue, les premiers pétards de la fête donnaient de la voix, accompagnées de cris et de rires. C’est la tante Martine qui serait l’invitée le lendemain elle présenterait son nouveau Jules. Les trois cousines viendraient aussi, Eliane, Carmen et Monique. Luc l’apprit en surprenant une conversation entre sa mère et Maurice. - Elle va venir avec son dernier mec, s’il reste, il a bien du mérite pour se mettre sur le dos une divorcée plus quatre filles... La quatrième, Lucie, restait à la campagne, élevée par les grand-parents. - Mais Nounou, il est certainement gentil ce Paul, suggéra Maurice mal à l’aise pour argumenter. Et puis, certaines comparaisons s’avéraient assez délicates, ne vivait-il pas en compagnie d’une divorcée, mère de quatre enfants? La réflexion de sa mère réveilla des souvenirs enfouis au plus profond de sa mémoire. Oui, brusquement il revoyait le ciel bleu vif, les galets, les vagues et les cris des goélands. Ils habitaient un hôtel, l’odeur écœurante du potage aux carottes lui sauta au visage. Mais oui! Marc, son grand frère était présent, il l’avait complètement oublié celui-là. Et cet autre garçon aux cheveux frisés, alité? Sa mère l’avait embrassé et lui avait dit, la voix chargée de sanglots, - Bonjour Dany, c’est moi ta maman, tu me reconnais? Le garçon la fixa de ses yeux fiévreux sans répondre, il se tourna sur le coté, vers le mur. Un beau soleil chauffait la plage de Saint Raphaël, chassant pour un temps le froid de Janvier. Luc et sa sœur découvraient la mer. Marion courait en poussant des cris aigus au devant des vagues. Il se souvint nettement qu’elle trébucha et tomba les fesses dans l’eau. Sa grande culotte en laine bleue, gorgée d’eau lui tombait sur les genoux. Protégée par deux rochers, sa mère en pleine séance de bronzage lui cria, - C’est bien fait pour toi, gèle-toi les fesses et ne viens pas m’embêter! Toutes ces images en apparence confuses, cependant aussi nettes que des photos, se succédaient dans un désordre qu’il fallait maîtriser. Il y eut un retour, long et pénible, une impression de voyage dans un tunnel sans fin. Le wagon était sombre, glacé et bondé. Une image plus forte jaillit. Il voulut aller aux toilettes et se faufila entre les grandes personnes debout dans le couloir. Arrivé enfin à l’extrémité, un déhanchement brutal du wagon ouvrit la portière, un souffle glacé le happa et il tomba dans le vide de la nuit. Un homme le rattrapa de justesse par les cheveux, l’homme et l’enfant roulèrent entre les jambes des voyageurs. Un visage flou, une forte odeur de tabac, c’est tout ce qu’il lui restait de cet épisode. Des voix de femmes aussi. - Quelle honte! Elle est où sa mère? Laisser un gamin se promener seul dans un wagon la nuit! - Oui, c’est bien malheureux, il y a des coups de pieds dans le cul qui se perdent, après tout ce qu’on a vécu, quelle époque! A moitié endormi, les genoux raidis par le froid, par la bise qui cinglait ses jambes nues, Luc revit la gare où il fallut changer de train. Des rafales de neige filaient presque à l’horizontale sur les quais, il était fatigué, transi, tenaillé par la faim. Marion marchait en dormant. La fin du voyage se perdait dans un oubli curieux, comme une anesthésie. Partis à quatre, ils revenaient à trois. Marc était resté à Saint Raphaël. Luc émergea lentement de ses souvenirs, sa mère terminait une phrase. - ...à poil, oui, à poil! Quelle honte, et dans les escaliers en plus, cette traînée! Se faire photographier à poil, et elle dit que c’est de l’art! - C’est ta sœur Nounou, tu ne dois pas la juger, c’est sa vie, et si elle se fait bien payer, que ça lui rapporte... - Tu parles! Un polichinelle dans le tiroir, ça oui, sur les quatre filles, pas une qui se ressemble! Luc connaissait bien les intonations de sa mère, et la jalousie maladive qui transparaissait dans. ( à suivre )

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    Le bunker du Japonais - La distillerie - Les lapins sont des cons

    Le radeau sur la Seille - La culotte de Lucette

      C’est vrai! jura Pinpin, je l’ai entendu aussi, et toi, ta balistique, c’est rien que des pissettes molles, t’as fermé les yeux, je t’ai vu!

    Un train de voyageurs les isola dans un nuage de coton. Ils trépignèrent de joie aux coups de sifflets belliqueux de la machine.

    - On y va, il est déjà cinq heures!

    Le Chemin du Lavoir descendait en pente douce, puis remontait vers la Place de l’Eglise. De nombreux potagers bordaient la droite de la descente, le haut mur du couvent fermait le coté gauche sur toute la longueur. Les branches chargées de grappes de cerises noires pendaient dans le vide comme autant de tentations et d’appels au péché. Les quatre têtes fixèrent les fruits sans y croire, ces maudites cerises les narguaient, si près que l’oeil distinguait les gonflements inégaux de la peau tendue des fruits, et pourtant, si loin... Malgré l’année passée, les trois mètres de surface lisse restaient infranchissables. Pinpin soupira,

    - Comment on va faire, c’est vachement haut...

    Le petit Yvan arriva à la rescousse.

    - Il faudrait tout simplement construire un échafaudage, c’est tout... Suffit d’avoir des idées.

    - Eh banane! Avec quoi tu veux le construire, de la poudre de perlimpinpin peut-être?

    Jeanjean voulut détendre l’atmosphère.

    - On s’assoit, on ouvre la bouche et on attend qu’elles tombent!

    Luc se tordit de rire.

    - Je vois tout à fait le tableau, toi en bas,la bouche grande ouverte, et en haut, un merle qui se goinfre de cerises, qui lève la queue, et toi qui gobes une belle chiure!

    Pinpin qui s’était éloigné revint vers le groupe en se frottant les mains.

    - Peut-être qu’elles sont pas si bonnes que ça les cerises, j’ai une meilleure idée. Suffit de grimper sur le grillage des jardins et on se tape plein de bonnes fraises. Il y en a tout un carré plus loin.

     La bonne humeur chassa la vue consternante des cerises, de plus, l’escalade du grillage n’offrait aucune difficulté. Ils s’abattirent sur le carré de fraises, sans avoir vu quelques lopins plus loin, un homme accroupi sur ses sillons de salade. Relevé, il repéra les chapardeurs et s’avança à grandes enjambées.

    - Eh les mômes, qu’est-ce que vous foutez là!

    La panique s’empara des garçons. L’homme se rapprochait vite, une pioche menaçante à la main. Un coup d’oeil suffit pour se rendre compte que le grillage vu de l’intérieur paraissait bien plus haut, presque une muraille.

    - Chacun dans une direction différente, cria Luc.

    Jeanjean coupa au plus court, c’est vers lui que l’homme accéléra. Pinpin couinait comme un goret, la peur lui donnait des ailes. Comment le petit Yvan s’était-il arrangé pour se trouver déjà de l’autre coté? A califourchon sur le grillage, Jeanjean encourageait son frère, l’exortait de toute la force de ses tripes.

    - Vite! Vite! Attrape ma main!

    Le jardinier rendu furieux par la fuite des trois autres se rabattit sur Luc. Celui-ci tenta un zig-zag trop serré, glissa dans la terre mouillée et s’affala dans une planche de petits pois à rames, couverts de filets de protection contre les oiseaux. Une peur désespérée lui vrilla l’estomac. Il ne pensait plus, ne réfléchissait plus, les coups de pioche qui allaient lui tomber sur le dos lui arrachaient des gémissements. Il voulut se débattre, pris au piège des mailles des filets accrochés aux boucles de ses sandales et à la boucle de sa ceinture.

    - Attends petit saligaud, je vais t’avoir!

    Il ne lui restait que quelques mètres à franchir. Un formidable instinct de survie aiguillonna le garçon qui s’arracha du sol, entraînant dans son sillage les filets, les rames et les petits pois.

    - Je te tiens!

    Luc entendit à peine sa condamnation à mort. Il ne courait plus, il volait. Des glaïeuls et des carottes s’ajoutèrent aux petits pois. Il obliqua pour éviter une armada de tuteurs pour les tomates. L’homme n’eut pas le temps de corriger sa trajectoire, il se prit les pieds dans un morceau de filet et chuta lourdement. Il avait été si près du but que le garçon pu flairer son haleine chargée de tabac. Le poids du jardinier contribua à faire céder les mailles et libérer Luc de son encombrante parure. Jamais il ne comprit d’où lui vint la force pour franchir le grillage d’un seul bond. Il courut jusqu’en haut du chemin où l’attendaient ses copains.

    - Bravo hurla Jeanjean, t’as sauté comme un gazelle, putain, quelle frousse j’ai eue pour toi!

    - Tu aurais pu nous ramener des petits pois, railla le petit Yvan.

    - Tu parles, j’en suis dégoûté jusqu’à la fin de mes jours! La vache!

    - Ah dis donc, t’aurais pas du bouger, il t’aurait pas vu avec ton camouflage, je te voyais même pas! Purée, la frousse, on aurait pu passer à la casserole... Faut dire qu’elles étaient vachement bonnes les fraises.

    Le clocher sonna six heures.

    - Il est l’heure, on fonce!

    - Continuez sans moi, je dois trouver des fleurs pour ma mère, salut!

    Un grand saule pleureur couvrait de ses rameaux tout un coin du petit parc sur la Place de l’Eglise, endroit très prisé par les mères qui venaient s’asseoir pour tricoter en bavardant, attentives aux gazouillis de leurs bébés. Luc passa devant deux personnes âgées en pleine discussion, d’un pas décidé, et dès qu’il eut la certitude de ne plus pouvoir être observé, il se jeta dans le feuillage des arbustes. La sueur perlait sur son front, son cœur cognait, ce n’était pourtant pas la première fois qu’il se servait à cet endroit. La hantise de se faire prendre par le curé ou le bedeau, ou pire encore, une sœur du couvent, lui arrachait des jurons et des grognements lorsqu’une branche lui résistait.

     Son gros bouquet de verdure à la main, il traversa la place au galop.

     

     

     

    Suite et fin de ce chapitre, avec un aperçu du suivant... Un teaser, en quelque sorte... Bonne Nouvelle Année!

     

     

     

     

     

     

     

     

     La Saga de Luc (suite ) 

     

     

     

     

     

    La fête du Sablon - Les cousines - La quête

    La Saga de Luc (suite)L’espérance et le Philharmonique - La lessiveuse (à suivre)

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