• La Provence à pied 19

     

    Ayons une pensée pour celles et ceux qui souffrent dans ces magnifiques Alpes Maritimes... La nature est dure avec ceux qui veulent l'ignorer...

     

     

    La Provence à pied 19La Provence à pied 19

     

     

     Le Castellaras

    A 1400 mètres d’altitude, domine l’Esteron, vue sur le Mercantour et Andon

     

    Curieuse sensation de solitude après la descente du col de Valferrière, aucune circulation en face, personne derrière. Le plateau apparait dans une brume qui isole encore plus des activités humaines. L’angoisse s’ajoute à la solitude lorsque des rafales de neige, presque horizontales, viennent frapper le pare-brise. Mais qu’allons-nous faire dans cette galère ?

    Le ciel s’ouvre soudain, pour se faire pardonner. Le domaine du Haut Thorenc nous accueille. Les premiers arrivés s’équipent déjà. On part.

    Les choses deviennent sérieuses, la pente se redresse. Le chemin devient un vague tracé, créé par les sangliers, puis, plus rien. Les ronces nous arrachent des pans de tissu, les visages et les mains sont labourés. On entend parler d’Europe Assistance, véridique ! Notre Présidente caracole en tête et clame, comme elle sait si bien le faire :

    -       Fiez-vous à moi, j’ai le sens de l’orientation !

    Nous sortons enfin de l’ombre assassine. LMU nous attend, les poings sur les hanches, contente d’elle :

    -       J’avais raison, ce n’était pas par-là !

    Une telle mauvaise foi ne peut attirer que respect et admiration. Mais voici le sommet. L’enceinte de l’oppidum nous tolère parmi ses ruines qui semblent encore résonner des commandements des templiers. Quelle vue ! A couper le souffle, dans tous les sens du terme, grâce à un vent tout droit sorti de la banquise. Une statue de la Vierge, fixée à la roche, porte son regard vers les sommets italiens. Qui a demandé :

    -       D’après vous, qui a monté la vierge ?

    -       Hi hi, moi je sais, répond une voix féminine, il s’appelle Joseph…

    -       Mais non mécréante, je veux dire, qui l’a grimpée, enfin non, qui la transportée depuis la vallée !

    L’incident est clos D’un autre côté, on pourrait se croire au Tibet avec cette corde tendue au vent et ses fanions multicolores. Vive l’œcuménisme… On pourrait aussi se croire dans une fumerie d’opium de Saigon. Pourquoi ? Vous n’avez pas vu toutes ces boulettes de shit carbonisé, à côté d’emballages Suzy Wang ? A quelques pas, un espace à l’abri du vent nous invite à la pause pique-nique. Il y a moins de monde que d’habitude, en revanche, il y a autant de vin. Vous saisissez ? LMU entame une vive discussion avec une bouteille de Côtes du Ventoux, ce qui la motive à mort, quelques instants plus tard, dans la descente. Elle galope en tête et lance à intervalles réguliers :

    -       Il n’y a qu’un guide, et c’est bibi !

    Milieu d’après-midi, JC number one, (l’autre JC, c’est le Grimpeux) décide de faire une reconnaissance. D’autres ont tenté de découvrir le Détroit de Behring, lui, veut trouver le col de Bleine. La troupe suit, mais mauvaise pioche. La preuve ? Cul de sac ! Se passe alors un événement qui laisse pantois, qui laisse douter de ses sens. Une apparition du troisième type se dégage de la sylve obscure. Elle s’approche, elle jette son dévolu sur le véhicule du Tripoteur de Tarse. Décontenancé, hébété, celui-ci vit s’approcher un mélange de Verdi et de Garibaldi, mâtiné d’un zeste de Moustaki. La conversation s’engage, animée, véhémente. Elle monte encore d’un cran. En fait, c’est l’apparition qui parle, qui s’enflamme et qui invective le malheureux Tripoteur de Tarse, qui en vient à se demander s’il n’y aurait pas une caméra planquée par là. On finit tout doucement par comprendre, que lui, avait été dans la résistance, et que ce n’était pas une poignée de citadins qui viendrait le déloger de sa forêt. Ouf ! On a eu peur, peur de voir apparaitre une mitraillette ou un fusil… On lui donne deux oranges et un Carambar, et on accélère.

    Fin d’après-midi. Une virée (payante) est proposée par le propriétaire du domaine, pour découvrir biches, bisons, et chevaux de Prewalsky en totale liberté. Des sangliers nous épient et nous suivent à bonne distance. Et puis… le choc. Des bisons, tout droit sortis des grottes de Lascaux, nous regardent arriver. Immenses, imposants, presque effrayants, mais superbes. Plus loin, quelques chevaux de Prewalsky se méfient à notre approche. Je voudrais récupérer mon coupe-vent, dans ma voiture, mais une montagne de muscles, dominée par de grandes cornes, se frotte contre ma portière.

    Ah, ce menu du soir ! C’est le Grimpeux qui préside la table. Il est notre œnologue de service. Un éclairage diffus fait luire d’une lueur satinée son crâne. C’est du Titien, du Raphaël…La bouteille arrive. L’index levé, l’auréole éblouissante, il fait faire encore quelques allers retours à la gorgée de jus de raisin, la fait ricocher entre ses incisives et sa luette. Ses yeux basculent. L’oracle a décidé, à nous l’ivresse éclairée !

    Nous sommes tous crevés, le lit nous attend…

     

     

    Gérard Stell

     

     

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