• La Provence à pied 15

     

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    La Provence à pied 15

     

    Collobrières. Dolmen de Gaoutabry

             Dans le Var, au cœur du massif des Maures

     

    La Provence à pied 15La journée promet d’être hot…hot… pas seulement en raison du soleil souverain, non. Notre Présidente gesticule, bien avant le départ, elle tempête, elle exulte, contre rien, contre tout. Elle libère l’énergie du straboum, qualité supérieure, dont elle s’est gavée. Pour être à la hauteur, dit-elle.

    Tiens, voilà la trésorière qui s’engouffre tout schuss dans un sens interdit ! Appels de phares bien entendu, mais elle nous fait un doigt d’honneur ! Ce sont les adultes d’aujourd’hui…

    Les rapides sont déjà loin, en pleine montée, comme s’ils voulaient violer au pas de charge, ce superbe ciel d’azur. Les autres, épicuriens de la rando, progressent en se hâtant lentement. C’est la seule façon d’être saisi par la vision grandiose de la Méditerranée transformée en miroir, d’être subjugué par les îles embrumées et mystérieuses. A nos pieds, les dessins géométriques des vignes aux feuilles rousses nous parlent de fameuses bouteilles… Plus près, tout autour de nous, un fouillis de chênes, d’arbousiers habillés de clochettes blanches et de pompons rouges vif, ainsi qu’un épais maquis de plantes odorantes, nous aguiche, nous charme.

    De fortes rafales de vent secouent la canopée en la faisant mugir et oblige le maquis à des révérences répétées. Voilà une randonnée qui s’annonce bien. Les prises de tête concernant « la bonne direction » à prendre s’inscrivent dans une continuité rassurante.

    Vous avez découvert, au fil des rapports, les différents titres de la Présidente : Schtroumpf vert, Cèpe galopant, Moncousinmadi, et Leader Maxima Unica.  Il y eut aussi un »dos argenté », celui qui pratique la mauvaise foi en l’élevant à un niveau spatial, eh bien, en voici un autre : Belles Bretelles. Croyez bien que l’intéressé, dont la pudeur et la discrétion sont proverbiales, ne se doute pas un instant avoir été pris dans les filets de la renommée. Tout ce qui suit est authentique. Et confidentiel, bien entendu, c’est une simple question d’éducation…

    Immergeons-nous dans le décor. Entre trois eucalyptus et un vénérable saule pleureur, et laissons venir à nous, le héros malgré lui.

    Accablé par le poids de son infortune, Belles Bretelles revient vers le chemin poudreux, agressé par les pensées les plus noires. Une confidente se trouve justement sur son passage. Il soupire de soulagement, il va pouvoir partager son infortune.

    -      Ah, si tu savais, tu ne devineras jamais ce qui m’est arrivé, pauvre de moi…

    -      Respire un bon coup, et raconte.

    -      Eh bien, tu connais ma pudeur… Je suis allé derrière les eucalyptus, pour me soulager certain que les troncs me camoufleraient…

    -      Oui ? Et alors ? Ne me dis pas qu’un koala serait descendu pour en croquer une…

    -      Non, pas un koala ! Pire ! J’étais là, debout, le regard perdu dans le vide, en attendant que ça se passe, quand je perçois un mouvement dans les roseaux, juste devant mon nez, je veux dire…juste devant moi…

    -      Un sanglier ?

    -      Non ! Une femme ! A moitié accroupie, la bouche ouverte, juste devant ma… devant ma…

    -      Du calme, il n’y a pas de quoi en faire un plat. Nous sommes tous des randonneurs, alors, tu sais… Et puis, ce n’est pas bien grave, c’est tellement petit ce que tu as à cacher…

    -       ??

    -      Ben oui, euh…

    -      Comment tu sais ?

    -      Euh, excuse-moi, je voulais dire… c’est pas grand, comparé à la situation inverse.

    -      De quoi parles-tu ?

    -      Mais oui, imagine que c’est toi qui arrive derrière les arbres, et tu es là, face à une femme qui a posé culotte, hein ? C’est quand même plus difficile à camoufler, non ?

    Belles bretelles ne répondit pas, peu convaincu par le raisonnement. Il se dirigea vers le groupe reformé après l’arrêt sanitaire. Il eut un sursaut. Il crut qu’on parlait de lui et à sa grande horreur, vit la randonneuse qui l’avait surpris dans ses œuvres, en grande discussion. Elle faisait des gestes des deux mains, comme pour indiquer une taille.

    -      Je te le dis, Nicole, petit, tout petit, comme ça, et tout fripé ! Tu ne peux pas savoir ! J’ai dû me faire violence pour ne pas le toucher et le caresser !

    -      Tu as bien fait, je sais que c’est mignon, mais d’après mon expérience, ils ne sont pas à leur avantage quand ils grossissent… Tu as fait quoi alors ?

    -      Mon mari m’a dit : c’est moi ou le sharpei, je ne veux pas de chien dans la maison !

    -      C’est une bonne décision, crois-moi.

    -      Tu crois aussi que c’est une bonne décision ?

    Elle lança un clin d’œil appuyé à Belles Bretelles qui aurait bien voulu disparaitre dans un trou. La troupe retrouva la vallée, au milieu des vignes et de grands nuages de poussière, comme dans Les raisins de la colère, de Steinbeck. Quelle journée !

     

    Gérard Stell

     

     

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